« De la résistance à la révolution ». C'est le mot d'ordre qui prévaut à la Libération. Cassou l'écrira quelques années plus tard ; le quotidien Combat en fait sa devise aussitôt. Autrement dit, la révolution accomplirait la promesse que portait la résistance. Et c'est autour de cette promesse, de ce rêve, que s'est organisée la vie intellectuelle française. Ils allaient la traverser, puis la déchirer.
Des débats qui en sont nés, de cette passion qui a fait de la France le phare de la vie intellectuelle mondiale, Michel Surya a choisi de rendre compte en se concentrant sur les oeuvres elles-mêmes, sur les conditions de leur apparition, le contexte dans lequel elles furent écrites, et l'effet qu'elles produisirent.
Travail titanesque : dépouillement systématique des revues (petites et grandes), à commencer par Les Temps modernes, La Nouvelle Critique, Les Lettres françaises ; relecture des oeuvres et de leur critique ; récit de leur réception et de leur diffusion.
Notre guide ici, ce sont les oeuvres, donc. Et quelles oeuvres, quand les intervenants ont pour noms Sartre, Mauriac, Breton, Rousset, Benda, Blanchot, Aragon, Koestler, Eluard, Leiris, Antelme, Martin-Chauffier, Vercors, Bataille, Malraux, Paulhan, Beauvoir, Vittorini, Ribemont-Dessaignes, Jankélévitch, Péret, Lukács, Mascolo, Levinas, Char, Monnerot, Ponge, Garaudy, Triolet, Camus, Lefebvre, Merleau-Ponty, Jdanov...
Ce que produit ce choc des idées ? Une formidable pénétration des thèmes de l'engagement, de la responsabilité particulière des intellectuels au regard du nécessaire et du vrai, de leur devoir de juger l'histoire et d'agir sur elle. Hommage, en quelque sorte, à ceux qui, les premiers, ont pensé l'impasse du communisme sans pour autant renoncer à poursuivre le rêve de révolution au-delà de lui.