«Ma rue, c'est un village», entend-on souvent dire. Pourtant, si dans l'après-guerre on pouvait encore avec à-propos qualifier certains quartiers populaires de «villages urbains», la référence au village semble aujourd'hui n'être qu'un fantasme.
Dans les faubourgs populaires récemment embourgeoisés, les nombreux «bobos» nouveaux venus sont ceux qui invoquent le plus la vie villageoise alors même qu'ils passent très peu de temps dans leur rue, pour eux simple décor dont la valeur se mesure à la présence d'immeubles de guingois, de cafés vieillots et de personnages hauts en couleur.
L'auteur s'interroge sur la persistance de cette référence à la vie villageoise et sur l'importance attribuée à la rue pour la vie de quartier. Le «retour à la rue» est un mouvement né à la fin des années 1950 en réaction à un urbanisme que l'on dit toujours «moderne» et que l'on a accusé de stériliser les villes.
Opposée à des grands ensembles réputés froids et inhumains, la rue s'est trouvée incarner l'urbanité. Aujourd'hui, un demi-siècle après les premières contestations de l'urbanisme moderne, il apparaît que, si la rue a bel et bien triomphé, sa victoire n'a pas pris la forme attendue.