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Dans « La femme essentielle » (même collection), Pierre Solié avait étudié les mythologies des grandes déesses agro-lunaires, qui avaient hanté le territoire de l'imagination humaine durant des millénaires, telles que Cybèle, Déméter, Isis, Tiamat ou Ishtar. Il en avait tiré la notion de fils-amants, à distinguer radicalement des fils œdipiens bien connus, et qui vivent des processus de structuration et d'individuation qui leur sont particuliers. À partir de là, Michel Cazenave s'attaque ici à la légende de Tristan et Iseut, paradigme, pour l'Occident, des amants et de l'amour impossible. Il montre qu'à côté du régime féminin lunaire, et lui étant complémentaire, il existe aussi un féminin solaire, aux soubassements psychologiques très profonds, qui gouverne à son tour une voie de perfection singulière. Il essaie de montrer comment s'y articulent les grandes notions jungiennes du Soi, des étapes de la vie, de l'anima, de l'animus, et les scénarios axiologiques de traversée de la mer, de combat du dragon, ou du développement de l'âme hors du vase alchimique. Il en tire la leçon que la réalité de l'âme est, peut-être, aujourd'hui, l'une des conceptions les plus subversives qui soient, et que notre société de crise n'a pas d'autre issue qu'une reprise en compte du féminin et la reconnaissance du principe divin, qui gît au plus profond de chacun d'entre nous.
L'esprit jungien Freud mettait en avant, à la fin du XIXe siècle, la notion d'inconscient. Il bâtissait alors une mécanique du refoulement et des pulsions que l'école néofreudienne devait considérablement élargir par la suite, dans une dynamique de la manifestation. La psychanalyse, encore toute récente, était cependant très vite revue dans sa conception par Jung. Celui-ci, particulièrement confronté aux problèmes de la schizophrénie, était en effet amené à retrouver - dans ses malades - des constantes mythiques, qui renvoyaient aux scénarios des plus vieilles religions. D'où l'hypothèse d'un inconscient collectif — réalité psychique objective et structure génératrice de dynamismes dans les âmes individuelles — et d'archétypes, qui polarisent l'imagination humaine dans des processus continuels, où l'on peut saisir leurs traces, sans jamais les dévoiler pourtant dans leur nature profonde. L'inconscient collectif ne nie pas l'inconscient personnel, mais le complète en l'informant, de même qu'il rétablit la possibilité de dialoguer avec l'esprit poétique, en tant que manifestation, et l'esprit scientifique (en particulier la physique et la neurobiologie), dans la mesure où ces disciplines renvoient - de plus en plus - à une unité du monde et de l'homme. La collection « L'esprit jungien » veut poursuivre cette voie dans les directions multiples de la théorie psychanalytique, de la mythanalyse, de la clinique, et de l'échange avec les autres sciences. C'est ainsi, peut-être, que l'on retrouvera ce Sens qui a tenu une place centrale dans l'œuvre, la vie et la pensée de C. G. Jung.