Même si elle est aujourd'hui bien oubliée, Louise de Rohan, comtesse
de Brionne et princesse de Lorraine, a fasciné ses contemporains
autant que la princesse Grace de Monaco ou «lady Diana» à notre
époque. Cette grande aristocrate à la beauté légendaire a également côtoyé
des personnalités très variées, et nous permet de les considérer sous des
aspects moins connus, qu'il s'agisse des philosophes Voltaire et Rousseau,
ou des souverains Gustave III, Joseph II et Marie-Antoinette (dont elle fut
un temps la favorite). Elle a aussi inspiré de tendres sentiments à Choiseul
et Talleyrand, deux grands ministres des Affaires étrangères, comme sans
doute à quelques autres. Elle sut néanmoins rester fort «sage» - selon le
mot de Casanova - en un siècle où on ne l'était guère dans son milieu, tout
en menant une existence très moderne pour son temps. Seule femme à
avoir assumé l'importante fonction de grand écuyer de France, elle avait
parallèlement la passion des voyages et des rencontres.
Ce personnage attachant incarne donc pleinement le dix-huitième
siècle finissant et «le plaisir de vivre» de sa haute société. Affrontant
ensuite avec courage et dignité les années noires de l'émigration, Louise de
Brionne mérite assurément le titre de «dernière grande dame de France et
d'Europe» que lui décerne son cousin le prince de Ligne, dont elle peut
être considérée comme le pendant féminin.