La Tombe du divin plongeur
Si je cherche une cohérence, une unité aux cent vies dont on dit qu'elles furent miennes, le divin plongeur - c'est le nom, au musée de Paestum, de la fresque qui ornait le plafond d'une tombe - occupe une place centrale. J'ai plongé en vérité tout au long de ma vie, et pas seulement dans la mer. Les choix décisifs que j'ai été amené à accomplir furent comme des plongeons, des piqués dans le vide. Voilà pourquoi j'ai décidé de donner ce titre, La Tombe du divin plongeur, à des textes écrits à différents âges de ma vie, en des occurrences radicalement étrangères les unes aux autres, et aujourd'hui introuvables, oubliés ou ignorés.
Pendant vingt ans, entre 1950 et 1970, je n'ai vécu que de ma plume, écrivant sous mon nom ou sous des pseudonymes. Mais on ne trouvera pas seulement dans ce livre ce que j'appelle mes écrits alimentaires, portraits d'acteurs, d'écrivains, de chanteurs, de voyous, reportages aussi, mais encore des articles parus dans Les Temps modernes, France-Observateur, Le Monde, consacrés à des événements importants du siècle, des textes politiques, polémiques, quelquefois les mêmes, tout un ensemble aussi qui s'organise autour de Shoah, des préfaces, des oraisons funèbres, des discours.
En les relisant après tant d'années, je leur ai trouvé bien plus qu'un air de famille ; j'étais incapable de déceler entre les uns et les autres l'ombre d'une différence. Plus encore, entre l'écriture de ces textes et celle du Lièvre de Patagonie, la parentèle était plus qu'évidente : c'était la même écriture. C'est alors que j'ai pris la décision de faire paraître ce livre.
Avec La Tombe du divin plongeur, je lutte pied à pied, comme je l'ai toujours fait, contre toutes les morts. Dans ce recueil on pourra lire : « Le temps, pour moi, n'a jamais cessé de ne pas passer. »