Le Journal du peintre Arnold Dachani, La tombe est dans la cerisaie, a été publié en roumain en 1947. Il paraît pour la première fois en français dans une traduction de l'allemand et du roumain de Philippe Kellmer - ami d'enfance de Paul Celan -, l'un des rares compagnons de déportation de Daghani ayant survécu.
Ce livre constitue un témoignage essentiel de la déportation des Juifs de Bucovine et de Bessarabie en Transnistrie, région d'Ukraine annexée par la Roumanie pendant la Seconde Guerre mondiale, de 1941 à 1944. Il s'agit d'un document décisif mettant à jour l'un des aspects de la Shoah aujourd'hui encore largement méconnu.
Arnold Daghani y évoque le camp de Mikhaïlovka entre 1942 et 1943, où ont été assassinés, parmi mille autres victimes juives, les parents de Paul Celan et la poétesse Selma Meerbaum. Il fait partie des multiples lieux de déportation installés le longdu Boug, fleuve d'Ukraine dont le territoire était occupé par les Allemands.
Le Journal d'Arnold Daghani, qui livre des données factuelles terrifiantes, est écrit sur un ton qui confère au Mal l'aspect d'une banalité absolue aux conséquences quotidiennes implacables. Il se termine par le récit haletant de l'évasion de Daghani et de sa femme, Aniçoara.
Arnold Daghani, né A. Kom le 22 février 1909, à Suczawa en Bucovine (Empire austro-hongrois - aujourd'hui Suceava en Roumanie) d'un couple de Juifs germanophones, est un artiste peintre.
Vivant à Czemowitz, Daghani et son épouse, Ani(...)oara Rabinovici, sont déportés le 7 juin 1942 vers la Transnistrie puis à Ladyjin, près du fleuve Boug. Ils y sont raflés le 18 août et conduits par la ss dans le camp de Mikhaïlovka en Ukraine.
Arnold Daghani et sa femme restent un an à Mikhaïlovka. Ils parviennent à s'échapper du camp avant qu'il ne soit liquidé par les nazis. Après la libération du ghetto de Berchad où ils ont trouvé refuge, les Daghani se rendent à Bucarest. Ils y restent de mars 1944 à décembre 1958. C'est là qu'Arnold Daghani réussit à publier son Journal en 1947 sous le titre Groapa este in bada de vi(...)ini (La tombe est dans la cerisaie).
En décembre 1958, les Daghani obtiennent enfin l'autorisation de quitter la Roumanie. Ils vivent en Israël, en Suisse, en France et en Angleterre où Arnold Daghani meurt le 6 avril 1985 à Hove (près de Brighton) huit mois après sa femme.