« Qui sauve le monde » : l'attention à la vie humaine, la sauvegarde de la vie se trouve au coeur de l'expérience historique du peuple juif ; elle est partout dans les anecdotes et la pratique des sages ; elle est au centre des commentaires des rabbins. Cette primauté de la vie se retrouve au fondement de toute éthique et vie en société : s'agit-il d'une révélation contenue dans le Livre ou d'une loi naturelle accessible à notre bon sens ?
D'autre part, l'intervention pour la vie peut entrer en concurrence avec d'autres préceptes de la Torah. Sauver une vie le jour du shabbat, c'est faire une exception. La primauté accordée à la vie tournerait-elle en idolâtrie de la vie ? Il faut alors une limite, une exception à l'exception : le martyr juif, au prix de sa vie, refuse l'idolâtrie, le viol, le meurtre. Tout près de nous, la Shoah, négation totale de la vie, relance le débat : l'impératif de la survie serait-il le « 614e commandement », le plus urgent ?
À l'heure où le prix de la vie humaine mobilise les consciences, à l'heure aussi où les vies humaines pèsent peu dans les conflits et les ambitions, la tradition juive, faisant entendre une réflexion singulière, rejoint des préoccupations universelles.
En quelques pages complémentaires, Jean Radermakers (professeur d'Écriture sainte à la Faculté jésuite de théologie de Bruxelles), situant Jésus dans la tradition juive de son temps, présente les résonances évangéliques du thème.
David Meyer, rabbin, diplômé du « Séminaire rabbinique Leo Baeck » (Londres), travaille comme enseignant et écrivain au rapprochement entre les trois grandes religions monothéistes. On doit Les Versets douloureux (Lessius, 2008) à son initiative.