« L'art de l'acajou fut un art anonyme, un art des choses. Les maîtres artisans s'imbibaient d'alcool et mouraient, tandis que les choses survivaient et vivaient ; auprès d'elles, on aimait, on mourait, et elles conservaient les secrets des afflictions, des amours, des actions et des joies. »
Roman-brûlot maintes fois comparé à Nous autres de Zamiatine, L'Acajou est le chef-d'oeuvre d'un écrivain maudit. Dans ce roman frondeur, qui vaudra la disgrâce à son auteur puis son exécution, Pilniak brosse le portrait d'une Russie rongée par la bureaucratie, d'un peuple dépossédé de son histoire. Il n'a pas fallu une décennie pour que l'utopie révolutionnaire disparaisse derrière les dérives totalitaires de l'appareil d'État.
Révolutionnaire, le roman l'est aussi par sa forme. Riche et complexe, sa prose fait écho à des oeuvres d'écrivains tels que Joyce ou Dos Passos. En fin de compte, c'est la transition dans la violence, la fin du monde ancien qui sont illustrées par cette prose incandescente.