Réformer l'administration : une démarche que tout gouvernement se doit - au moins symboliquement - de mettre en œuvre pour manifester son souci de «modernisation» des structures administratives. La réforme du Renouveau du Service Public, initiée en 1989 par le gouvernement Rocard et reprise par le gouvernement Juppé, s'inscrit sans conteste dans cette problématique. L'auteur de l'ouvrage entreprend de décrypter toutes les étapes, de la «conception» à la «mise en œuvre» de cette politique de «responsabilisation» des fonctionnaires pour mettre à jour ses effets sociaux. On découvre ainsi que cette réforme est le fruit d'une réflexion conduite depuis une dizaine d'années par des hauts fonctionnaires qui ont utilisé la nomination de Michel Rocard comme opportunité politique pour faire valoir leur conception du bon management administratif. On découvre également que, loin des stéréotypes du fonctionnaire «poussiéreux», les agents des services publics ont largement valorisé cette réforme par une multitude d'appropriations volontaires, collectives et individuelles. Ce constat - montrant que les fonctionnaires ne sont pas hermétiques à des techniques managériales inspirées du secteur privé - a conduit l'auteur à analyser le processus historique de légitimation de la responsabilisation et à retracer l'évolution sémantique et sociale de cette notion. Cette analyse rétrospective montre à quel point le Renouveau du Service Public s'inscrit dans un processus d'imposition de discours et de pratiques concernant les finalités de l'organisation sociale. Au-delà de ses caractéristiques techniques, cette réforme constitue ainsi un des vecteurs de l'idéologie de la «modernisation» dans notre société.