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« Comme tout Français et patriote, je n’avais pas encore moralement surmonté les épreuves et j’étais profondément affecté par le deuil de mon père. C’est dire que j’abordais des fonctions nouvelles dans une ville inconnue, sous la férule allemande et dans des conditions psychologiques et morales très mauvaises. » C’est ainsi que Maurice Papon explique son arrivée le 1er juin 1942 à Bordeaux où il vient prendre ses fonctions de secrétaire général à la préfecture de la Gironde. Numéro 3 de cette administration régionale et départementale, il a sous sa responsabilité un certain nombre de services, dont celui des questions juives. Ce poste, il l’occupe jusqu’à mai 1944, date à laquelle il est confirmé dans ses fonctions. Aujourd’hui, il comparaît devant les assises de la Gironde, inculpé de complicité de crime contre l’humanité pour avoir contribué à la mort de 1 690 Juifs. Que s’est-il réellement passé au cours de cette période troublée, dans une ville de la zone occupée et considérée comme zone interdite par les Allemands ? À 31 ans, Papon, fonctionnaire anonyme du corps préfectoral, comme ses 90 collègues occupant un poste similaire en France, a signé des documents administratifs pour la persécution des Juifs. Il ne renie pas sa signature. À travers lui, c’est la collaboration de Vichy aux horreurs de l’Holocauste qui est mise en accusation. Mais Papon sera-t-il jugé pour ce qu’il est devenu après la Libération, préfet de police et ministre, ou pour ce qu’il était pendant la guerre ? À Bordeaux, deux journalistes ont remonté le temps et l’histoire quotidienne pour replacer les faits et les acteurs dans leur époque.