L'amour de la langue
Il y a d'une part la langue, comme entité objective, qu'on peut décrire et même formaliser ; il y a d'autre part cette langue où l'être parlant inscrit son désir, son inconscient, sa subjectivité. Elle ressemble à la première ; en fait, du point de vue matériel, elle en est indistinguable, mais elle se déploie tout autrement : dans les jeux de mots, dans la poésie, dans les homophonies. Pour rendre compte à la fois de la ressemblance matérielle et de la différence radicale, Lacan avait forgé en un seul mot : lalangue.
Les grammairiens et les linguistes rencontrent lalangue en un seul mot, mais ils ne veulent parler que de la langue en deux mots. Quand ils parlent de la langue (en deux mots), la jouissance qui les saisit leur vient de lalangue (en un mot). Bref, ils sont sans cesse renvoyés d'un point à un autre. Dans ce battement, s'installe, tantôt au départ, tantôt à l'arrivée, l'amour de la langue.