Peu d'oeuvres cinématographiques auront exercé une fascination aussi forte que celle de ce cinéaste d'origine viennoise, dont la carrière, amorcée au lendemain de la Première Guerre mondiale, s'est déroulée successivement à Berlin, à Hollywood et à nouveau en Allemagne, où il devait tourner ses derniers chefs-d'oeuvre.
«Le meurtre surgit du plus noir du coeur humain. [...] Il est possible que chacun de mes films où le crime est représenté avec le plus d'horreur représente, de ma part, un meurtre virtuel.»
Des Trois Lumières (1921) à M le Maudit (1931), du Docteur Mabuse (1922) à L'Ange des maudits (1952), des Nibelungen (1924) aux Contrebandiers de Moonfleet (1954), de Metropolis (1927) au Tigre du Bengale (1959), Fritz Lang a imposé un univers dominé par la hantise du Mal, par l'obsession du pouvoir absolu, et par un sentiment de la fatalité exprimé dans un style d'une rigueur implacable, confinant à l'abstraction.
Mais cette oeuvre constitue également une étonnante (et parfois effrayante) parabole sur l'Histoire comme tragédie, et une préfiguration visionnaire du totalitarisme du XXIe siècle. Héritier en cela d'une certaine tradition romantique, Fritz Lang développe une dialectique de l'ombre et de la lumière et entraîne le spectateur dans un labyrinthe, où pullulent les sociétés secrètes, les mondes souterrains, les associations criminelles et les pratiques occultistes.
Dans ce Lang (Qui suis-je?), l'auteur s'interroge notamment sur les rapports, demeurés largement obscurs, entre le cinéaste et le national-socialisme, ainsi que sur les conditions de son départ d'Allemagne en 1933. Il procède aussi à une réévaluation des trois grandes périodes de sa carrière et remet en cause l'opinion la plus communément répandue, selon laquelle Fritz Lang aurait réalisé ses meilleurs films aux Etats-Unis.
Illustration de couverture: portrait photographique de Fritz Lang (D. R.)
Couverture: David Gattegno