L'Annexe. Quand elle n'est pas en mission, Anna retourne à Amsterdam, dans l'annexe où Anne Frank s'est cachée avec sa famille, avant d'être déportée, en 1944. Lors d'une de ses visites, l'espionne comprend qu'elle est suivie. Sans tarder, son organisation l'exfiltre dans une maison de protection, dont elle est supposée ignorer l'emplacement. Mais une allusion au smoked-meat de chez Schwartz's la convainc qu'elle va atterrir à Montréal, la ville de ses grands-parents. Celle dont le métier exige maîtrise des émotions et oubli de soi se laisse envahir par les souvenirs de ses vacances d'enfant.
Dès son arrivée dans cette nouvelle annexe, un autre pan occulté de son passé se rappelle à elle : Celestino, chargé de veiller sur les neuf membres de leur insolite communauté, est un fou de littérature. Dans l'appartement couvert de bibliothèques, Anna s'abandonne aux réminiscences de ses études et à son goût exclusif pour la lecture, qu'elle avait sacrifié en changeant de vie.
Avec le fantasque majordome prétendument cubain, qui la surnomme Albertine, l'espionne rebaptise ses compagnons de réclusion du nom des auteurs ou des personnages qu'ils lui évoquent : un vieux couple slave devient les Tourgueniev ; un agent d'apparence banale, certainement capable du pire, Meursault ; le chat, Moortje, comme celui d'Anne Frank.
Ni la prisonnière ni son gardien ne perdent pourtant de vue l'enjeu de leur brillant duo. Et c'est tout l'art de Catherine Mavrikakis que de puiser dans la fiction la bien réelle issue de leur vénéneux pas de deux... Jouant avec les codes du roman d'espionnage et de captivité, L'Annexe se révèle un éblouissant hommage à la puissance invaincue de la littérature.