Je sens une présence. Je retiens mon souffle. Si c'est un animal, il ne faut pas lui faire peur. Ce serait étonnant avec toute cette neige, mais ma chance est peut-être arrivée. Je pivote sur mes pieds, très lentement, dans la forêt à laquelle j'appartiens ce soir, avec les arbres d'hiver, dans ce temps en dehors du procès. J'attends ma récompense, je l'aurai. Le cerf qui se présentera à moi sera un signe. Le signe d'un amour, d'une amitié, d'un lien féroce avec le vivant Quelques instants de véritable paix encore. Puis on dirait que la forêt me met en garde. Il y a quelqu'un. Mon attention se transforme en affolement Je cours vers le chalet. À l'orée du bois, je m'arrête : l'ennemi est là, devant ma porte.
Ciblée par de nombreuses menaces, dues à son statut d'écrivaine féministe et militante, la narratrice s'isole dans un chalet en pleine forêt pour disparaître. Tandis que la neige recouvre tout dehors, elle s'abandonne à son monde intérieur et remonte le fil des événements. Elle se remémore l'arrivée du beau-frère dans la famille et de toute la violence des hommes qu'il cristallise. À son contact, les personnalités s'effilochent et l'inacceptable devient pardonnable : alors que la famille détourne les yeux, on lui demande de maintenir la paix par son silence. Or face à cette situation, elle ne peut qu'ouvrir une porte à la vérité par l'écriture, et tenter de construire un témoignage universel.