Dans la dernière décennie du XVIIIe siècle, la peinture grotesque, rebaptisée
arabesque, fait l'objet en Allemagne d'un vif débat polémique qui oppose
tenants de l'Aufklärung et représentants du néoclassicisme. Friedrich
Schlegel détourne cette notion d'arabesque picturale qui fait l'actualité au profit de
sa théorie poétique, par laquelle il fonde le romantisme en Allemagne. L'arabesque,
devenue une forme littéraire qui par la voie du Witz réalise une fusion allégorique
des contraires, occupe une position centrale dans sa Lettre sur le roman de 1800. La
notion telle que la définit Schlegel s'y révèle, grâce au mode de pensée analogique
qu'il privilégie, d'une grande richesse polysémique. En effet, elle désigne à la fois
la production romanesque contemporaine héritière de Laurence Sterne, la grande
poésie italienne, espagnole et anglaise de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance,
et le genre progressif qui doit engendrer la poésie romantique de l'avenir. Cet
ouvrage propose une analyse de cette notion et des diverses créations littéraires
censées l'incarner.