La dialectique guerre-révolution marque, du début jusqu’à la fin, la perception du conflit et de ses enjeux par l’armée française. Jusqu’en novembre 1942, par-delà les divergences sur l’évaluation du risque d’insurrection communiste en France et sur la nature des liens entre Allemagne et URSS, un clivage constant, plus ou moins accentué selon les périodes, divise l’institution militaire entre les partisans d’une guerre contre le communisme et ceux qui estiment que l’Allemagne doit demeurer notre seul ennemi. À partir de l’automne 1942, la question du communisme change d’échelle : d’abord, avec l’affirmation évidente de la puissance militaire soviétique ; ensuite, avec la perspective d’une insurrection nationale coordonnée avec les armées alliées pour la libération du pays. Aussi, devenant en 1943 le principal acteur français dans la guerre, le général de Gaulle impose le principe d’une double alliance, l’une avec l’URSS, l’autre avec le PCF. En conséquence, l’armée régulière réunifiée et les officiers résistants de métropole vont, peu ou prou, jouer un rôle clé dans la mise en œuvre de cette politique qui introduit une césure dans la culture contre-révolutionnaire de l’armée française. L’ouvrage exploite des sources inédites : les archives du contre-espionnage (fonds restitués par la Russie) ; les documents militaires de la période de Vichy conservés dans les archives des Affaires étrangères ; les carnets du général Petit, chef de la mission militaire à Moscou à partir de mars 1942 ; les archives de la direction du PCF en France (1943-1944).