«Le présent livre est construit autour d'un paradoxe. Nous vivons dans le monde du triomphe
de l'esthétique. La beauté est supposée être partout : dans les produits packagés, les corps du
body-building, l'environnement préservé, la nourriture sur les assiettes ; même les cadavres sont
emballés dans des housses clean. Mais ce triomphe de l'esthétique s'accomplit dans un monde
vide d'oeuvres d'art, au sens de ces objets rares qu'on accrochait naguère dans les musées et qu'on
venait contempler religieusement. Ce qui remplace l'oeuvre ? Des «installations», des «performances»
- des expériences esthétiques où il ne reste plus qu'un gaz, un éther, une buée artistique.
Ce n'est pas la fin du monde et il n'y a pas lieu de crier au scandale. Mais il est urgent de
voir qu'on est en présence d'un nouveau régime de l'art, que les temps modernes et même post-modernes
sont derrière nous. Il nous faut aussi comprendre cette nature gazeuse de l'art pour saisir
le monde et la culture où désormais il se diffuse.»