« Toutes les oeuvres d'art sont un fait social total immatériel et donné à qui veut le recevoir, puis le rendre. La circulation du symbolique est libre, car elle révèle par là même notre liberté à tous, donc nos libres obligations à l'égard des autres dans une circulation infinie des êtres, et surtout de l'être contre l'avoir. Imaginaire, immatériel, fiction et jeu de l'art se retrouvent ainsi réunis par ce geste de donner. »
On a peu écrit sur les liens entre esthétique et économie politique, en raison de la revendication d'autonomie de l'esthétique et de la prétendue déconnexion entre éthique et économie. Pourtant, il nous semble que parler de plaisir, de goût, d'intérêt personnel et de valeur lorsqu'il s'agit d'économie, résonne en accord avec les termes de l'esthétique moderne. Comment prétendre que, de la modernité à nos jours, l'esthétique constitue une sphère pure et n'a pas eu de lien avec les enjeux économiques et sociopolitiques ? Accaparés de plus en plus par de nouvelles formes d'économisme, allant jusqu'au fétichisme de l'immatériel, l'art et l'esthétique contemporains doivent être repensés dans une tout autre perspective historique et proposer de nouvelles formes de nos relations aux oeuvres, notamment à travers l'obligation maussienne du donner-recevoir-rendre et de bien d'autres pratiques et expériences esthétiques du don en devenir.