La critique française des années quatre-vingt - quatre-vingt-dix a été peu favorable à la notion d'auteur au cinéma. Elle a vu dans sa fonction une imposture qu'il fallait énucléer. La vertigineuse anony-misation des sujets entre en grande part dans l'attaque qui fut faite contre l'auteur. Que retenir d'une figure auctoriale que l'idéologie dominante ne veut jamais reconnaître et qui réussit à l'utiliser comme marchandise ? Cet ouvrage aborde en détail une grande bataille de la pensée contemporaine autour de la posture de la critique cinématographique et du signataire de l'oeuvre au cinéma, de l'auteurisme et de l'anti-auteurisme.
Il était logique que la Nouvelle Vague inventât l'auteur. Signature du réalisateur, signature du critique, partout le nom propre apparaît comme un label. Partout, celui qui signe laisse une trace de son passage : entretiens, articles, débats dans les médias. Curieusement, l'auteurisme est né sans théorie particulière. Bazin, Truffaut, Godard, ont polémiqué sur la notion d'auteur. Lorsque 1968 balaya la notion de pouvoir et d'autorité de l'auteur, elle apparût aux Etats Unis avec, Andrew Sarris et Peter Wollen, qui envisageaient une réflexion sur la classification spécifique des auteurs dans le panthéon artistique de la critique. Les féministes américaines, elles, verront en l'auteur une fonction générique qui rétablit la place d'un sujet, individuel ou collectif. La fonction créative devient un enjeu de la construction du sujet au féminin et du sujet du spectateur dans la critique.
Il ne s'agit pas ici d'étudier la question de l'auteur en se contentant d'ausculter sa présence, son évocation ou ses substituts dans l'art cinématographique. Il s'agit plutôt de réfléchir sur la posture d'auteur, en tant qu'elle implique un engagement à la fois personnel et idéologique et, par là contribue à définir la manière dont l'œuvre entretient un rapport avec le monde.