Entre 1980 et 1982, la Suisse a été le théâtre du plus étonnant mouvement de jeunes que l’Europe ait connu depuis 68. L’événement a émergé, notamment, à Zurich, dans la capitale du business et de la culture avec un grand C. Il convient, en 1984, durant l’« année Orwell », de se demander ce que nous apprend ce mouvement. Si une telle éruption est apparue dans un pays aussi connu pour sa prospérité, que pour son système démocratique, n’est-ce pas un signe alarmant pour tous ceux qui espèrent qu’il suffit de pousser tout pays vers le « développement » ? La Suisse serait-elle, pour une fois, en avance sur d’autres pays, comme cela a été dit ? Ce livre est une analyse critique de l’événement, fondée sur une relecture d’un grand nombre de documents du moment - et d’études parues depuis - et qui ne sont pas traduits en français. Que veut dire vivre, dans une société de travail ? Qu’est-ce que la vie quotidienne dans une société prospère ? Que trouve-t-on dans le rock ? Les jeunes définissent-ils un avenir original ? Certains d’entre eux esquissent, parfois en le disant, une autre société, mais le symptôme que ce mouvement nous jette à la figure est bien l’absence de confiance en l’avenir, le repli sur un avenir instantané. Cette position soulève, bien sûr, davantage de problèmes qu’elle n’en résout. Il reste qu’il ne suffit pas de supprimer le symptôme ; les problèmes laissés en suspens nous restent, bel et bien, sur les bras.

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