Rien ne relie Apollinaire, Claudel, Cocteau, Crommelynck, Ghelderode, Soumagne, Vitrac, les principaux dramaturges étudiés dans ce livre, sinon leur désir de théâtre et, plus précisément, d'expérimentation théâtrale. Leurs oeuvres ne forment en aucun cas un courant : elles ne privilégient pas des thématiques particulières et propres à l'époque, ni des procédés qui permettraient de les ramener à une esthétique commune. Elles procèdent, au contraire, de stratégies dramaturgiques aussi diverses qu'inédites, stratégies mises en oeuvre avec une radicalité telle qu'elle confine parfois à l'aporie. Aussi différentes soient-elles, ces oeuvres se répondent pourtant : Pierre Piret s'attache à montrer qu'elles radiographient une mutation civilisationnelle majeure, qui concerne le statut du signe et donc l'expérience sociale du sujet humain, et qu'elles y réagissent au travers d'innovations dramaturgiques qui, aussi gratuites ou absurdes puissent-elles parfois paraître, témoignent d'une interrogation fondamentale qui a traversé les arts de l'époque et, plus largement, les sciences humaines.