Le héros sert d'interprète au chef du service de police, lequel interroge des kyrielles de jeunes fugitifs en demande d'asile politique. Tous racontent des atrocités subies, entendues, inventées - quelle différence ? l'humanité est un mélange de cruauté et d'affabulations nourries par cette cruauté. Ces protocoles policiers ont une répétitivité tragique, leitmotiv d'un livre où viennent s'entremêler d'autres discours, comme le journal intime d'une future cantatrice dont le fiancé part à la Première Guerre mondiale, ou encore des épîtres envoyées par le narrateur à « Nabuchodonosaure », roi d'une île qui est tout son empire, précipité de tous les absolutismes impériaux de l'Antiquité et de tous les sévices de toujours.
Un éternel questionnement semble hanter les entrelacs du livre, comme dans une comptine d'enfant : Pourquoi ? - Parce que ! Chacun laisse une trace sur la main courante du commissariat de l'Histoire, une grande migration de destins fait pousser la branche de l'humain, tandis que les hommes tombent comme des feuilles. La cantatrice émigrée à Paris retrouve la trace d'Abélard et Héloïse, l'album de la vie est incongru, l'interprète perd définitivement l'amour de sa femme à Rome où il était allé pour le recoller... Vénus ne tient qu'à un cheveu !