« Le réflexe de hausser les épaules lui cause une douleur insoutenable. Il chute dans les mottes de terre. La boue l'aspire, il a tant plu ces derniers jours. La nuit est tiède. Ce pourrait être une nuit d'août, alors que la guerre ravage le monde. »
L'épisode de la « poche de Falaise », en août 1944, a été traité par maints historiens, mais que sait-on des soldats allemands qui survécurent et désertèrent ? De ceux qui n'étaient pas nazis, comme certains des gamins recrutés de force dans les Jeunesses hitlériennes, et qui se retrouvèrent à combattre pour une cause qui n'était pas la leur ? Le Chevreuil relate le parcours de l'un d'entre eux, prénommé, pauvre de lui, Adolf. Rescapé des terribles combats qui prirent la Normandie pour cadre, il erre, après la Libération, d'un abri à un autre, rencontrant des individus prêts à le dépouiller ou, au contraire, à lui venir en aide. Lui, le disciple qui s'ignore de Gandhi et de Thoreau, s'essaie à trouver sa place. Une toute petite place. Mais le passé, tel un chasseur s'apprêtant, au terme d'une longue traque, à abattre le chevreuil épuisé, rejoint cet être trop doux pour son époque.