Pierre-Jean Amar, fils unique d'une famille juive algéroise, orphelin de père à quinze ans, sera jusqu'à l'âge adulte prisonnier d'une mère malade et autoritaire, extraordinairement abusive. De cette jeunesse confisquée, d'où il ressort une funeste impression de mort dans la vie, naîtra un goût pour l'art et un .besoin d'expression que la pratique de la photographie allait combler. C'est donc naturellement par ce moyen qu'il a fait, en fixant divers objets de l'appartement où il vivait près d'elle (l'armoire à pharmacie débordant de remèdes, le placard à vaisselle, le lit, la table de nuit... et jusqu'au coffre-fort tellement symbolique de son enfermement) une manière de portrait par contumace de cette mère aimée autant qu'haïe, et un autoportrait par ricochet.
Cette tentative autobiographique - dont le lecteur saisit forcément la dimension d'exorcisme - le mettra dans une position positivement inconfortable : celle d'avoir à reconnaître dans cet étrange cas de possession les marques les plus banales de l'amour et de la vie ordinaire.