Figure de proue des échanges et transferts culturels entre la France et l'Allemagne, Lorenz Stein (1815-1890) mérite aujourd'hui toute notre attention : l'œuvre de ce sociologue et philosophe du droit, qui fut l'un des pionniers de la «science de l'administration», servit en effet de source d'inspiration à bien des théoriciens de l'Etat social moderne. Marx la considérait comme l'une des meilleures sources de la pensée socialiste à ses débuts : un jugement qui fut repris dans la littérature marxiste ultérieure. Stein lui-même, qui avait pris appui, dans son traitement original de la «question sociale», tant sur la Philosophie du droit de Hegel que sur la nouvelle pensée sociale française (celle de Saint-Simon et de Fourier, en particulier), avait pourtant été très réservé sur les solutions proposées, dans les courants de pensée dits «marxistes», à cette question. Cherchant à éviter toute réponse révolutionnaire, il voulut plutôt faire progresser les réformes sociales, en mettant l'accent sur la nécessité de conduire les classes les plus défavorisées elles-mêmes à la propriété - et à la culture.
Est présentée ici, cent cinquante ans après sa publication mais pour la première fois en traduction française, la première partie de l'Histoire du mouvement social en France, de 1789 à nos jours : le texte même qui, selon Herbert Marcuse, constitue le «premier ouvrage sociologique allemand».