Le conflit entre l'oralité et l'écriture dans l'appropriation de l'évangile
L'individu sortant de l'oralité vit intimement écartelé entre « les choses traditionnelles » et « les choses modernes », « les choses du village » et « les choses de l'Église », sans que, au cours de sa vie, ces deux visions du monde puissent s'unifier en lui.
Cet écartèlement traduit au plus haut niveau le conflit type généré par la nouveauté de l'écriture et ses ressources au sein d'une culture orale multimillénaire. Vécu hier par le peuple de la Bible, par le peuple grec, et jusqu'à plus récemment par les peuples d'Europe, ce conflit type est désormais hélas oublié, et, avec lui, la nature des problèmes que pose 1a sortie de l'oralité à un peuple donné.
Et, pour l'avoir oublié, de nombreuses études bibliques et théologiques du XXe siècle ont abordé la question orale, sans que celle-ci satisfasse les espoirs mis en elle. Aujourd'hui, l'oralité demeure définitivement marginalisée en théologie. L'une des questions que pose le présent travail est donc la suivante : et si la question orale demeurait jusque-là mal posée ?
La présente recherche situe l'interaction oralité/écriture comme le lieu d'un questionnement fondamental approprié à la situation de la sortie de l'oralité et, donc, susceptible d'éclairer les problèmes variés que rencontrent les peuples sortant actuellement de l'oralité, aussi bien dans leur projet d'appropriation de l'écriture comme nouveauté technoscientifique, que dans leur projet d'appropriation de l'Évangile comme Parole de Dieu, éclairant et unifiant la vie individuelle et collective.