L’île de Bretagne fut longtemps pauvre en écrivains latins, à l’inverse d’autres provinces de l’Empire romain. D’où l’intérêt du De Excidio Britanniae, écrit par Gildas au VIe siècle, qui au reste n’a d’abord retenu l’attention que des historiens du fait que l’auteur commence son livre par le rappel des événements qui ont marqué l’île entre le début de notre ère et son époque : rappel dont la nature est maintenant remise en question. On découvre à étudier l’œuvre de Gildas un ouvrage nourri de disciplines et de textes essentiellement ecclésiastiques, et, en même temps, ce qui n’est pas contradictoire, l’héritage de la rhétorique du Ve siècle, les formules et les développements tombés dans l’usage commun. Le vocabulaire est bigarré, la syntaxe, correcte et même conservatrice, le style en revanche contient des traits qui caractériseront un certain latin insulaire, de tendance baroque. On a l’impression que l’école est proche, une école de bon niveau, mais de type colonial, gardienne des règles tout en étant soucieuse de rivaliser avec les meilleurs stylistes. Par ailleurs, si les Romains ont quitté l’île depuis plusieurs décennies, Gildas reste attaché à l’idéal d’un Empire garant de paix et d’unité. Il critique le manque de loyalisme des Bretons, leur attachement aux usages locaux et les Saxons, déjà dans l’île et encore païens, sont pour lui des Barbares. Attitude de refus, qui contraste avec les missions de Patrice en Irlande. Gildas aura surtout des successeurs, semble-t-il, dans le domaine du style.