Quelques mois dans la vie d'une petite fille dont l'univers
mental et sentimental balance lentement, du cocon familial et
protecteur de la maison où sa mère penchée sous la lampe de
la cuisine confectionne une robe « fantaisie, sans excentricité »,
jusqu'à l'école où l'enfant découvre son nom, « Bailleul
Annie », inscrit en violet sur un carton vert.
Avant le terrain vague, frontière arbitraire entre ces deux mondes, il y a la chaude présence d'une mère qui fascine
l'enfant, au-delà, l'apprentissage merveilleux des mots et de
leur singulier pouvoir.
« Qui étais-je vraiment ? Petite fille habitée de mauvais
rêves et traversée de fantômes, trouée comme une passoire par
tous les pores de sa peau... Perméable à toutes les érosions
et dérisions... Décapée, dépitée, décapitée à chaque déluge,
nettoyée et vidée de ses émotions primaires... Notre maison
était creuse et moi comme elle car l'école était pleine. »