Il y a peu de temps encore, le dimanche s'ordonnait autour de l'église
pour les uns, du café pour les autres, et de l'inévitable repas dominical
pour la plupart. Mais aujourd'hui, citadins et ruraux oscillent plutôt entre
temps à perdre et argent à gagner. Quoi de commun, en ce début de
XXIe siècle, entre le dimanche estival d'une grande ville européenne et celui
d'un village écossais ou champenois ? Quoi de commun avec ce que l'on
croit deviner des rythmes hebdomadaires des sociétés anciennes où le
dimanche s'opposait aux six autres jours ?
Alain Cabantous met au jour les modalités selon lesquelles les
sociétés occidentales des Temps modernes, massivement rurales,
ont vécu leurs relations au dimanche. À l'appui de nombreuses
archives religieuses, judiciaires ou littéraires, il montre comment
le dimanche, à l'origine au coeur de la culture chrétienne, devient
progressivement le lieu du «temps libre», propice au divertissement,
à l'oisiveté subversive - et un véritable enjeu de pouvoir : les théologiens
et les politiques cherchent à renouveler son sens, quand les
individus prétendent en disposer librement. Le dimanche s'impose
ainsi comme le révélateur des tensions profondes qui animent les
sociétés européennes.
À l'heure où la question largement controversée du travail dominical
s'impose de façon récurrente dans le débat public, cette histoire du
dimanche révèle la propension des pouvoirs à s'emparer des repères
temporels et leur ambition d'imposer aux populations leur perception
de la temporalité.