L'étourdit constitue sans doute le sommet de l'enseignement de
Lacan. Il s'agit d'un texte d'une difficulté inouïe qui traite essentiellement
du discours psychanalytique. Si dans une première lecture
(2002), Christian Fierens en a proposé un commentaire mot à mot,
phrase par phrase, lettre par lettre, dans cette deuxième lecture, il
s'engage, avec risques et périls, dans l'interprétation du même texte,
dans l'acte de dire propre au discours psychanalytique. Il le fait parler
au-delà de lui-même.
Le discours psychanalytique - qui n'est pas le discours tenu par l'analyste
- doit se soutenir dans le lieu de l'analyse. C'est le défi que doivent
relever les «analystes». L'analyste ne prend son ex-sistence que
de là. Il ne peut tenir que la place d'objet a, d'opinion vraie, place
éphémère, fragile, de semblant. Destiné à être mis de côté pour que
la structure de modification puisse jouer, il n'est nullement l'absolu
savoir dont se prévaut quelque pouvoir. Même s'il est mis à cette
place de sujet supposé savoir (la névrose y dispose), il n'est pas cet
absolu. «L'analyste déclare forfait» pour tous les rôles qu'on voudrait
lui faire jouer.
Ainsi l'effacement de l'analyste introduit une révision complète des
grands axes de la psychanalyse, une nouvelle lecture des formules
phalliques de la sexuation, une nouvelle portée de la castration et de
la coupure en général, une critique du groupe analytique, une nouvelle
conception de l'interprétation et du transfert.