En lançant la politique de l'enfant unique en 1979 simultanément
aux grandes réformes économiques, le gouvernement chinois
entendait accélérer la modernisation. Bien qu'il se réclame toujours
du marxisme, le «socialisme de marché» est désormais prôné. La
population est encouragée à s'enrichir et le pays se trouve de plus
en plus intégré dans les processus de la mondialisation.
À partir d'une étude de terrain menée dans la ville nouvelle de
Langfang (province du Hebei), site d'une modernité utopique, ce
livre porte sur le façonnement de la première génération d'enfants
uniques. Dans un pays où les structures familiales sont fondées sur
le culte des ancêtres et un système de filiation strictement patrilinéaire,
la position d'unique descendant occupée aujourd'hui par tous
les enfants uniques les rend particulièrement précieux aux yeux de
leur entourage et leur vaut le surnom de «petits empereurs».
Cependant, on évoque aussi souvent leur lourd «fardeau», car ils
se trouvent également seuls pour réaliser les attentes et assurer
l'avenir de leurs parents.
Ce contexte de profondes mutations (familiales et économiques)
place les enfants uniques au coeur du problème que pose la transmission
face à une situation radicalement nouvelle. Que transmettent
les familles dans un environnement bouleversé ? Qu'en
dire au regard de l'éducation scolaire qui met directement en application
les volontés gouvernementales ? En définitive, qui sont les
nouveaux sujets chinois, «petits empereurs» d'un pays communiste
qui pratique le libéralisme économique ? Force est de
constater qu'ils ne sont pas passifs. Acteurs à part entière de leur
vie et du monde, ils sont créateurs de culture.