L'histoire du repas, et plus particulièrement du festin, mérite bien
mieux qu'une approche anecdotique. Comme l'ont remarqué de
nombreux anthropologues, sociologues et historiens, le repas
pris en commun occupe une place fondamentale dans les rapports
sociaux, les attitudes religieuses et même l'exercice du pouvoir, et ce dans
des sociétés de natures très diverses.
Le présent ouvrage explore l'histoire du festin en Angleterre pendant
les siècles du haut Moyen Âge, de la fin de la domination romaine à la
conquête du pays par les Normands en 1066. Grâce à des sources
exceptionnelles, au premier rang desquelles ont peut ranger le poème
héroïque Beowulf, l'Angleterre offre en effet un prisme original, souvent
négligé par l'école historique française, pour l'étude des pratiques
politiques, sociales ou religieuses, mais aussi des mentalités et des
représentations collectives de l'Occident chrétien au début du Moyen Âge.
Car si aujourd'hui l'Angleterre n'est pas souvent réputée pour sa table, il
en fut tout autrement aux premiers temps médiévaux, quand les princes
anglo-saxons, dans leurs halls de bois, abreuvaient leurs guerriers de
bière et d'hydromel.
Notre étude du festin anglo-saxon, bien que fondée sur le témoignage
irremplaçable de la poésie héroïque, fait aussi une large place aux apports
des sources narratives latines, des codes de lois, de l'iconographie, et
surtout de l'archéologie.