Aux thuriféraires de la «religion athlétique» et du «culte de
la performance», voici opposée la têtue réalité des faits.
Censurées, occultées, refoulées, ces réalités, loin d'être
de simples «déviations», «dénaturations» ou «dérives»
comme le répètent à l'envi les idéologues sportifs, constituent
au contraire la substance même du football-spectacle.
Derrière le matraquage footballistique de l'espace public se
profilent toujours la guerre en crampons, les haines identitaires
et les nationalismes xénophobes. Et derrière les gains,
transferts et avantages mirobolants des stars des pelouses,
promues «exemples pour la jeunesse», se cachent les salaires
de misère, le chômage, l'exclusion, la précarité et l'aliénation
culturelle de larges fractions de la population invitées
à applaudir les nouveaux mercenaires des stades comme
naguère les foules romaines étaient conviées par les tyrans
aux combats de gladiateurs. Le football-spectacle n'est donc
pas simplement un «jeu collectif», mais une politique d'encadrement
pulsionnel des foules, un moyen de contrôle
social qui permet la résorption de l'individu dans la masse
anonyme, c'est-à-dire le conformisme des automates.