Crise financière de 2008, « crise migratoire », mouvements des Gilets Jaunes en France, épidémie de covid-19 : les solidarités sont régulièrement mises à l'épreuve et réactivées sous le registre de la crise. Derrière ces épisodes marquants, depuis les années 1980, les mécanismes de solidarité subissent des transformations continues et en profondeur. D'un côté, le chômage structurel, le vieillissement des populations et le creusement des inégalités socio-économiques et territoriales engendrent le retour de l'insécurité sociale. D'un autre côté, les gouvernements engagent des réformes touchant au coeur de l'État social tout en menant une succession de réformes territoriales modifiant le paysage politique de la solidarité. La résurgence de la « question sociale » interroge alors le devenir des politiques sociales et fait douter des capacités redistributives et protectrices de l'État, au point que l'on peut se demander si l'idée même d'une fabrique publique de la solidarité n'est pas en train de se déliter.
La puissance publique est-elle encore en mesure d'organiser la solidarité ? Assiste-t-on à une actualisation ou à un renversement des conceptions relatives à la gestion de la question sociale ? Sous l'effet des processus d'européanisation, de décentralisation, de recentralisation et de fusion, comment rendre compte des renoncements ou des recompositions qui seraient à l'oeuvre ?
En réunissant des enquêtes empiriques inédites sur des terrains français, belges et québécois, cet ouvrage collectif apporte une contribution à la littérature centrée sur les différents régimes d'État-providence, en retravaillant la question du gouvernement des solidarités au croisement des territoires infranationaux, des secteurs d'action et des acteurs positionnés à des échelles multiples.
Prenant appui sur un des axes de recherche de la Chaire « Territoires et mutations de l'action publique » (TMAP), le projet de cet ouvrage est issu du colloque « Quels territoires et quelles régulations pour gouverner les solidarités ? » organisé en janvier 2019 à Sciences Po Rennes, en partenariat avec ASKORIA, avec le soutien du laboratoire ARÈNES (UMR 6051).