Au sein de l'histoire des dictionnaires de la langue française, le Grand Vocabulaire François publié entre 1767 et 1774 par l'éditeur Charles-Joseph Panckoucke est presque passé inaperçu. Cet ouvrage est pourtant constitué de pas moins de 30 volumes au format in-4°, ce qui fait de lui l'une des plus grosses entreprises lexicographiques de l'époque.
En dépit de la discrétion manifeste de Panckoucke à son égard, ce répertoire occupe une place tout à fait importante dans l'histoire des dictionnaires publiés en France. Il permet dans un premier temps de mieux comprendre la soif encyclopédique qui va animer Panckoucke tout au long de sa vie, depuis le rachat des droits de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert jusqu'à la publication de sa célèbre Encyclopédie Méthodique (1782-1832). Dans un second temps, il permet d'apporter un éclairage supplémentaire à la querelle idéologique et scientifique ayant opposé les grammairiens-philosophes de l'Encyclopédie aux Jésuites de Trévoux.
À la fois dictionnaire universel, dictionnaire de langue et dictionnaire grammatical, le Grand Vocabulaire François est un répertoire doté d'une véritable originalité scientifique. En introduisant des noms propres, en fournissant une description diachronique de la langue et en proposant, avant l'abbé Féraud, une systématisation des indications prosodiques et phonétiques du lexique, ce monument de la lexicographie française se défend ainsi des accusations de plagiat formulées à son encontre et s'impose comme un maillon inexploité du développement des connaissances sur la langue.