Comment exercer son métier de reine ? Comment résister à la routine des divertissements utiles et des obligations de son sexe ? Comment surtout s'inventer un rôle politique lorsqu'on est née Marie-Caroline de Habsbourg-Lorraine et qu'on se trouve exilée à la cour de Naples, au coeur des tumultes de l'Italie des Lumières ? De 1781 à 1785, la reine de Naples s'est attachée à l'exercice quotidien de ses « écritures », sans doute pour discipliner ses propres affects.
C'est à la lecture de ce diaire qu'est convié le lecteur. Écrit dans le français parfois audacieux qui était la langue des élites européennes, ce journal d'une reine est un document historique d'une exceptionnelle richesse. Au-delà de la chronique de la vie
de cour, on y assiste au surgissement d'un moi souverain qu'agite, en ces années pré-révolutionnaires, le souffle de l'histoire.
Rassemblant des pièces dispersées, Mélanie Traversier reconstitue le journal de Marie-Caroline de Naples, présenté ici pour la première fois dans son intégralité. L'édition annotée comporte en effet la retranscription d'un manuscrit que l'on croyait perdu : le récit du voyage de la reine en Italie du Nord de mai à septembre 1785, sorte de tournée d'inspection des expériences politiques du réformisme des Lumières. Elle est précédée d'un ample essai qui, à travers l'analyse de sa pratique épistolaire et
de son écriture intime, éclaire la biographie d'une soeur méconnue de Marie-Antoinette.