Le Kersanton
Une pierre bretonne
Le kersanton - ou kersantite des géologues - tire son nom d'un hameau de la rade de Brest en Bretagne. Cette roche filonienne intrusive, d'origine profonde, a été recherchée tôt par suite de sa singulière aptitude au façonnement. Elle a permis la sculpture des porches et calvaires dans les enclos paroissiaux entre les XVe et XVIIe siècles. Ultérieurement, elle a été appréciée par l'art funéraire et, à l'issue de la Grande Guerre, lors de l'érection d'innombrables monuments aux morts ; plusieurs autres roches bretonnes, de teinte sombre, ont pu alors la concurrencer.
Toutefois, le plus fort volume de kersanton, extrait dans la seconde partie du XIXe siècle et au début du XXe siècle, a été mis en oeuvre dans l'habitat et les travaux publics (infrastructures portuaires, ferroviaires, militaires, construction des phares...). La situation des principales carrières en bordure de la rade de Brest facilitait son acheminement par voie d'eau. Les exploitations, occupant plusieurs centaines de personnes, présentaient une organisation industrielle.
Aujourd'hui, les sites abandonnés sont noyés ou comblés ; les quais d'embarquement s'écroulent ; les amoncellements de blocs rebutés sont envahis par la végétation... Seule la restauration des monuments historiques pourrait raviver quelques carrières célèbres.
Au total, la saga du kersanton, éclairée par de nombreuses photographies inédites dues à l'auteur, glisse insensiblement de l'Histoire naturelle - en l'occurrence la Géologie - à l'Histoire et plus particulièrement à l'Histoire de l'art en Bretagne occidentale.