Le Nil
Lettre à Louis Bouilhet, Le Caire, 15 janvier 1850 (1850)
« Cependant le soleil montait derrière la chaîne arabique, le brouillard se déchirait en grandes gazes légères, les prairies coupées de canaux étaient comme des tapis verts, arabesques de galon, de sorte qu'il n'y avait que trois couleurs : un immense vert à mes pieds, au premier plan, le ciel blond-rouge comme du vermeil usé, derrière et, à côté une autre étendue mamelonnée d'un ton roussi et chatoyant ; puis les minarets blancs du Caire tout au fond, et les canges qui passaient sur le Nil, les deux voies étendues (comme les ailes d'une hirondelle que l'on voit en raccourci) ; çà et là dans la campagne, quelques touffes de palmiers. »
Entre 1849 et 1852, le jeune Gustave Flaubert réalise un long voyage en Orient avec son ami l'écrivain et photographe Maxime Du Camp : ensemble, ils parcourent l'Égypte avant de remonter vers l'Italie en passant par Jérusalem et Constantinople. Dans cette lettre datée de janvier 1850 et adressée à son ami le poète Louis-Hyacinthe Bouilhet, il raconte ses impressions, l'éblouissement de la descente du Nil, et le spectacle magique des pyramides vues de nuit. On retrouve des textes similaires dans ses carnets de voyage, lesquels serviront d'inspiration littéraire pour certains de ses romans, notamment Hérodias.