De 1880 à 1940, le mouvement ouvrier juif fut une force généralement décisive dans la vie et l'évolution des communautés juives européennes. Nathan Weinstock, en une vaste fresque, en a restitué la diversité des organisations, partis, syndicats et journaux. Sa connaissance du yiddish, langue dans laquelle pour l'essentiel s'exprimaient les revendications des artisans et des travailleurs, lui a permis d'exhumer des textes qui sont autant de facettes d'une foisonnante activité ouvrière. Dans l'Empire russe d'avant 1914, la prépondérance du Bund, le grand parti socialiste juif, et sa farouche autonomie face aux bolcheviks et aux mencheviks ne sauraient faire oublier les autres organisations : les Poaley-Tsiyon, les territorialistes et les sejmistes. Ni occulter que les débats au sein du mouvement ouvrier juif ne reflétaient pas seulement des querelles théoriques, mais répondaient à des urgences pratiques : que faire face à la vague d'antisémitisme populaire et de répression policière qui déferlait dans l'Empire jusqu'à la veille de la Grande Guerre ?