Le Pavillon des cancéreux, conçu en 1955, rédigé dix
ans plus tard, est l'oeuvre la plus accessible d'Alexandre
Soljénitsyne, celle où il est le plus fidèle à la grande
tradition du réalisme russe du dix-neuvième siècle. Il
situe le combat de l'homme face à la pensée de sa mort
dans une salle d'hôpital, à Tachkent, la ville où lui-même
fut soigné pour un cancer en 1955. La salle où il
nous fait vivre l'angoisse par l'intérieur de chacun des
sept personnages qui y sont enfermés, et nous fait voir
chacun par les yeux de tous les autres, est un échantillonnage
de la société russe au moment dit du
«dégel», c'est-à-dire juste après la mort de Staline. Par
le moyen de l'épreuve à laquelle il soumet ses personnages,
l'auteur a su donner des aspects shakespeariens
au problème du mal qui ronge cette société.
Véritable fable philosophique sur «ce qui fait vivre
les hommes», ce long récit est aussi un poème dédié à
l'énergie de vivre, un hymne à l'homme en tant que
rescapé de la mort et de l'échec.
«Par l'immensité du témoignage, la rigueur de son
architecture, le souffle épique, la richesse de l'émotion,
la force de l'ironie, Soljénitsyne nous a imposé sa
marque.» (Georges Nivat)