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A en juger d’après la controverse, souvent passionnée, qui oppose spécialistes ou profanes depuis quelques années les investissements directs des États-Unis à l’étranger seraient à la fois la meilleure et la pire des choses, suivant la parole d’Esope. Faut-il parler d’impérialisme ? Les Américains s’en défendent. S’il est vrai que l’origine de la domination politico-économique des États-Unis doit être recherchée du côté du Pentagone, du Congrès et de l’opinion publique plutôt que dans les cercles dirigeants des milieux d’affaires, il est également évident que ce sont les entrepreneurs américains qui investissent à l’étranger et non la population, et qu’ils ne le font qu’à la condition d’être soutenus - financièrement, diplomatiquement et éventuellement militairement - par le gouvernement des États-Unis. Au regard de l’analyse économique traditionnelle, l’investissement direct américain fait d’ailleurs figure d’hybride, à la fois stock et flux, tour à tour interprété comme une réincarnation du bien et du mal. Pour les États-Unis, le bien, c’est le stock de capital détenu par des Américains à l’étranger, gage désormais dépassé de la convertibilité internationale du dollar et moyen de domination économique et politique sur le monde non-communiste ; c’est aussi le flux croissant des profits rapatriés engendrés par ce stock de capital. Le mal, c’est le flux incoercible de sorties de capitaux à long terme des États-Unis vers l’étranger destiné à financer les investissements nouveaux, qui grève la balance des paiements américains. Mais pour le reste du monde, le bien est ce qui est mauvais pour les États-Unis et le mal ce qui est bon pour les États-Unis. Que faire ? L’ambition des auteurs de ce livre, Christian Goux et Jean-François Landeau, tous deux universitaires et praticiens de l’économie, est de démontrer que la seule alternative réaliste en matière d’accueil des investissements directs américains réside en un « dirigisme tempéré ». Un sursaut nationaliste, en effet, ne parviendrait qu’à « nationaliser des murs ». A l’opposé, en rester au « laisser-faire » équivaut à se mettre - insensiblement mais inéluctablement - sous la dépendance économique, politique et culturelle des États-Unis : il faut que chacun sache que c’est en cela précisément que réside le Péril américain.