La présente étude est née du souci de prendre au sérieux l'idée que «le temps n'est pas refoulé de la réflexion saussurienne» et qu'«il y est même omniprésent, surtout quand il paraît évacué» (Michel Arrivé, 1990).
On critique souvent la linguistique saussurienne à travers le filtre structuraliste, en disant qu'elle est à la fois anhistorique et antipragmatique. Elle serait ainsi intrinsèquement atemporelle. Poser le problème du temps chez Saussure, c'est d'abord répondre à cette critique. Mais comme Saussure n'a jamais défini le temps en tant que tel, il faut relire tout ce qu'on connaît de lui - cours de linguistique générale, recherches sur la légende germanique, recherches sur les anagrammes - à la lumière de cette catégorie phénoménologique. Parler, raconter, versifier peuvent-ils se comprendre sans diachronie ?