L'idée de Samuel était belle et folle : monter
l'Antigone de Jean Anouilh à Beyrouth. Voler deux
heures à la guerre, en prélevant dans chaque
camp un fils ou une fille pour en faire des acteurs.
Puis rassembler ces ennemis sur une scène
de fortune, entre cour détruite et jardin saccagé.
Samuel était grec. Juif, aussi. Mon frère en quelque
sorte. Un jour, il m'a demandé de participer à cette
trêve poétique. Il me l'a fait promettre, à moi, le petit
théâtreux de patronage. Et je lui ai dit oui. Je suis allé
à Beyrouth le 10 février 1982, main tendue à la paix.
Avant que la guerre ne m'offre brutalement la sienne...
S. C.