Depuis la fin des années 1980, le rap est devenu, au Gabon comme dans d’autres États du continent africain, le levier de constructions identitaires, de reconfigurations des rapports au politique et de transformations culturelles majeures. À l’inverse des discours abordant ce genre musical globalisé comme emblème de l’« occidentalisation » ou de l’homogénéisation culturelle, l’appropriation du rap a donné lieu, à Libreville, à des formes variées de réinventions de particularismes et de revendications de la localité, se déclinant dans le registre du genre, du religieux, du rapport à la nation, à l’ethnicité ou à l’africanité. Née d’une immersion de plus de huit années dans les réseaux du hip-hop gabonais et africain, l’ethnographie multisituée proposée dans cet ouvrage éclaire les entrelacements des pratiques musicales, des dynamiques identitaires et des rapports au pouvoir, en décrivant comment les rappeurs du Gabon se sont progressivement imposés comme des acteurs politiques majeurs d’un régime semi-autoritaire en mutation. Par le biais de l’anthropologie des pratiques musicales, cet ouvrage offre un axe de compréhension novateur à propos de l’histoire politique et culturelle du Gabon, et des scènes musicales qui contribuent à mettre en mouvement les villes africaines contemporaines.