Le Renversement platonicien n’est ni un commentaire de type philologique ni une approche de style idéaliste, ni une explication d’obédience historiciste ou déterministe. Par questionnement, lecture et interprétation des textes, qui ne sont pas exclusivement platoniciens, on a voulu produire une sémantique philosophique. Le sous-titre Logos, Epistémè, Polis entend souligner la double actualité de Platon sur un triple registre. Celui d’une « linguistique » où, par une théorie iconographique du nom et la fonction sémantique de la vérité de la proportion, la dialectique s’apparente à une philosophie du langage. Celui d’une « épistémologie » où, sur le tableau des « sciences » et des « arts » et pour résoudre la crise des « irrationnelles », la science géométrique occupe la position d’un savoir dominant. Celui enfin d’une « politologie » qui aborde les questions fondamentales pour la cité, de la nature et de la loi, du droit et de la violence, de l’égalité et de l’inégalité mais travaille aussi à partir de modèles « géométriques », de schèmes « esthétiques » et d’emprunts « ethnographiques » à la construction d’une cité théorique – la cité idéale. Ce qu’il est convenu d’appeler la doctrine des idées, ainsi réexaminée à la convergence des problèmes du langage, de la science et de la cité, ne peut plus dès lors être interprétée sous l’hypothèse de l’« idéalisme ». Elle se manifeste comme une série de questions de sens où s’indique une philosophie de la raison. « Partout où le logos nous porte, c’est là qu’il faut aller », tel en serait le mot d’ordre, mais avec la précision qu’à l’articulation du mythique et du théorique, du tragique et du philosophique, et plus profondément de la déraison et du logos, le rationalisme platonicien n’est pas fait que de raison.