Situation inédite en Europe post-communiste, la Pologne a conservé une masse de petits agriculteurs familiaux, propriétaires de leurs terres. Les logiques de fonctionnements propres à l'exploitation paysanne ont été profondément déformées par les règles de l'économie dirigée. Une décennie après la disparition d'un système institutionnel qui bloquait leur modernisation, que sont devenues ces exploitations familiales?
La confrontation avec l'économie de marché a ouvert la voie d'un processus de différenciation entre une agriculture professionnelle de type marchand et une agriculture paysanne de subsistance. La réalisation d'un modèle familial marchand est limitée par la survie, largement assistée, d'une majorité de petites exploitations vivrières. Jouant le rôle de «filet de sûreté», une agriculture à fonction sociale maintient à la terre un excédent de bras et diffère la restructuration attendue. À la veille de l'élargissement européen, cette dualité structurelle fait problème.
Appréhendé dans ses diverses dimensions structurelle, sociétale, et culturelle, le repli paysan apparaît l'axe majeur de la transformation post-communiste dans les campagnes. À partir d'enquêtes de terrain, effectuées au plus près des acteurs sociaux, l'analyse retrace la singularité de la trajectoire polonaise dans la diversité des contextes et des itinéraires locaux.