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Comme toute autre population, les Ankave des hautes terres de Papouasie Nouvelle-Guinée connaissent l’alternance des joies et des peines. Mais au cœur de leur façon d’expliquer les malheurs et le deuil surgissent des êtres cannibales, appelés ombo’. Invisibles, ces monstres avaleurs de cadavres rodent autour des défunts et tourmentent les vivants. Ils sont si envahissants et si menaçants que les Ankave d’aujourd’hui, soixante ans après leur première rencontre avec les Blancs, continuent une ou deux fois par an de battre à tout rompre, nuit après nuit, les tambours qui expédient les esprits des morts récents hors de leur vallée. Cet impressionnant sabbat destiné à faire disparaître les spectres est l’un des moments rituels importants de leur existence et dans leur combat contre les monstres cannibales le rôle dévolu aux chamans se révèle essentiel. Pour Pierre Lemonnier, étudier les ombo’ est une manière de peindre la vie des Ankave et de comprendre comment ils imaginent le monde et s’efforcent d’agir sur lui. Dans la tradition des grands récits ethnologiques, avec talent, clarté et vivacité, il évoque ses séjours en famille chez les Ankave, restitue leur environnement, leur façon de vivre et de penser, étudie les rites, les pratiques, les idées dont la cohérence propre fonde l’identité de leur société. Outre son apport majeur à la connaissance des cultures et des organisations sociales de Nouvelle-Guinée, cet ouvrage élargit la perspective : en effectuant un rapprochement entre les ombo’ et nos sorcières des XVe-XVIIe siècles, il propose en effet une réflexion critique originale sur l’histoire de la sorcellerie occidentale.