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Au front, à l'arrière, le conflit militaire est partout
En mars 1915, le père d'Arsène Lupin est sollicité pour apporter lui aussi sa contribution à la rubrique des contes de guerre du grand quotidien national Le Journal, et il entame sa série des Contes héroïques, publiée durant un an.
Dans ces contes, Maurice Leblanc montre comment la guerre a bouleversé les rapports sociaux, les mœurs, les relations interpersonnelles, et remis en question l’égoïsme individuel ou mondain, qui prévalait avant la guerre et qui fut le sujet de nombre de ses propres contes. Face au drame collectif que constitue la guerre, qui s’installe dans la vie de tous pour longtemps, conduite avec des méthodes nouvelles ancrées dans la durée et la dureté, chacun des personnages réagit de façon inédite en réveillant une part enfouie de vertu, qui s’appelle héroïsme, abnégation, sacrifice, honneur, simplicité, courage. Qu’il ait été criminel, vagabond, infidèle, couard, ou seulement citoyen ordinaire, la guerre fait office de révélateur.
Un roman historique qui permettra d'évaluer les conséquences sociales et psychologiques de la Première Guerre mondiale
EXTRAIT
Vers minuit, on vint frapper à la porte de la petite cellule qu’Yvonne Dalbrecq occupait au troisième étage de l’hôpital. — Vite ! vite ! madame Yvonne, un convoi de blessés qui arrive ! Elle ne dormait pas. Bien qu’à bout de forces au soir de ses longues journées d’infirmière, si laborieuses et si émouvantes, elle avait encore des insomnies où l’assiégeaient tous les mauvais souvenirs de sa vie brisée ; les trahisons de son mari, les pardons inutiles, les humiliations, et puis, après vingt ans de martyre, la fuite de l’infidèle, de l’infidèle aux cheveux gris qui s’éprenait bêtement d’une fille quelconque. Depuis six mois c’était fini. Au cœur d’Yvonne il n’y a plus d’amour pour celui qu’elle méprise. Elle ne souffre même plus. Mais parfois, durant les heures où l’on s’oublie à remuer le passé, quel goût d’amertume lui montait aux lèvres ! — Allons, dit-elle en s’habillant, un peu de fatigue encore. Tant mieux ! Sous la blouse d’infirmière, coiffée du bonnet qui encadrait si joliment son doux visage à peine touché par la souffrance, elle descendit dans les anciens parloirs du rez-de-chaussée que l’on avait transformés en lavabos. L’un d’eux lui était réservé. Une demi-douzaine de soldats s’y trouvaient déjà étendus sur des matelas, et les deux infirmiers de service commençaient à les dévêtir et à les laver, avant qu’ils ne fussent conduits dans les salles de visite.
A PROPOS DE L'AUTEUR
Maurice Leblanc est né en 1864 et mort en 1941. Mondialement connu pour être le père d'Arsène Lupin, le genre de prédilection de Maurice Leblanc fut le roman policier et d'aventures. Repéré par Jules Renard et Alphonse Daudet, il a inspiré de nombreux écrivains, notamment Gaston Leroux et les auteurs de Fantômas.