Le 16 juin 1937, alors que la guerre civile fait rage en Espagne, Paco et quatre de ses camarades des Jeunesses du POUM (Parti ouvrier d'unification marxiste) sont arrêtés à l'hôtel Falcón, siège de ce parti à Barcelone. Le même jour, des dizaines de militants et la majeure partie de la direction du POUM sont pris dans un vaste coup de filet organisé par les agents du Guépéou, désormais tout-puissants en zone républicaine. Cette vague répressive marque un tournant : soumettant toute la société à sa logique, la guerre dévore la révolution.
Paco et ses camarades sont emprisonnés jusqu'en juin 1938. Quelques mois plus tard, il traverse la frontière avec le flot des troupes républicaines en déroute. Après un séjour dans d'ignominieux camps de concentration français, il s'évade et s'installe à Paris pour le restant de sa vie. Ouvrier, il se joint aux petits groupes - de Socialisme ou Barbarie à ICO - qui dénoncent le despotisme soviétique tout en exposant sa nature capitaliste. Quand, en mai 1968, Paco et ses collègues d'usine prennent parti pour les étudiants révolutionnaires, ils sont à nouveau classés comme des « éléments suspects » par les cheffaillons de la CGT.
Dans la narration de cet itinéraire modeste et singulier, le protagoniste s'efface souvent derrière le mouvement de l'Histoire. En suivant son parcours, on revisite les événements à l'aune de la vie des individus et de leurs contradictions. On en retiendra que lui et ses amis, pris dans le tourbillon de la révolution, ont eu le courage de rompre avec l'imposture stalinienne. Ils ont puisé dans le POUM, radical et atypique, une raison de vivre... et, pour nombre d'entre eux, de mourir.