«Au cap Saint-Jacques, elle embarqua sur un bâtiment de
transport de troupes pour remonter la rivière de Saigon.
On entrait dans les terres, on touchait au but. À l'avant du
bateau, conquérante, elle scrutait le paysage, un médiocre
paysage, très plat, des mangroves pleines de palétuviers,
puis des rizières à l'infini dans lesquelles travaillaient
des Annamites sous leur chapeau pointu, et des buffles
gris et maigres. La rivière n'en finit pas de dérouler ses
méandres. Enfin le quai des Messageries. Une fanfare
militaire les accueille, qui lui donne des frissons au coeur.
Mais ce qui l'envahit avant même de descendre à terre,
c'est l'odeur. L'odeur de Saigon, ce mélange lourd de
vase, de sucre, d'épices, de saumure...»
Avec pudeur et sensibilité, Pascale Roze brosse le portrait
de Laurence Bertilleux, une jeune femme de vingt-cinq
ans qui va vivre en Indochine les débuts de la guerre. Avec
L'eau rouge, elle livre un roman d'apprentissage beau et
grave, et une réflexion sur le temps qui passe et le devoir
de mémoire.